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Séide.

De ce grand sacrifice ainsi l’ordre est réglé !
Il le faut de ma main traîner sur la poussière,
De trois coups dans le sein lui ravir la lumière,
Renverser dans son sang cet autel dispersé.

Palmire.

Lui, mourir par tes mains ! tout mon sang s’est glacé.
Le voici, juste ciel !…

(Le fond du théâtre s’ouvre. On voit un autel.)

Scène IV.

ZOPIRE ; SÉIDE, PALMIRE, sur le devant.
Zopire, près de l’autel.

Le voici, juste ciel !…Ô dieux de ma patrie !
Dieux prêts à succomber sous une secte impie,
C’est pour vous-même ici que ma débile voix
Vous implore aujourd’hui pour la dernière fois.
La guerre va renaître, et ses mains meurtrières
De cette faible paix vont briser les barrières.
Dieux ! si d’un scélérat vous respectez le sort…

Séide, à Palmire.

Tu l’entends qui blasphème[1] ?

Zopire.

Tu l’entends qui blasphème ?Accordez-moi la mort.
Mais rendez-moi mes fils à mon heure dernière ;
Que j’expire en leurs bras ; qu’ils ferment ma paupière.
Hélas ! si j’en croyais mes secrets sentiments,
Si vos mains en ces lieux ont conduit mes enfants…

Palmire, à Séide.

Que dit-il ? ses enfants !

Zopire.

Que dit-il ? ses enfants !Ô mes dieux que j’adore !

  1. « Pour la scène du quatrième acte, écrit Voltaire à d’Argental, il est aisé de supposer que les deux enfants entendent ce que dit Zopire ; cela même est plus théâtral et augmente la terreur. Je pousserais la hardiesse jusqu’à leur faire écouter attentivement Zopire, etc. »