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NOTICE SUR LA VIE ET LES ÉCRITS

conduite plus modérée, la liberté n’eût pas éprouvé tant d’obstacles, ni coûté tant de sang. »

La modestie et la simplicité de son caractère et de ses mœurs ne l’abandonnèrent jamais, et les honneurs dont il fut revêtu ne l’éblouirent pas un instant. « Je suis toujours le même, » écrivait-il à un de ses intimes amis, « un peu comme Jean La Fontaine, prenant le temps comme il vient et le monde comme il va ; pas encore bien accoutumé à m’entendre appeler monsieur le comte, mais cela viendra avec les bons exemples. J’ai pourtant mes armes, et mon cachet dont je vous régale : deux colonnes asiatiques ruinées, d’or, base de ma noblesse, surmontées d’une hirondelle, emblématique (fond d’argent), oiseau voyageur, mais fidèle, qui chaque année vient sur ma cheminée chanter printemps et liberté. »

On a souvent reproché à Volney un caractère morose et une sorte de disposition misanthropique, dont il avait montré des germes dans les premières années de sa vie. Ce reproche, il faut l’avouer, n’a pas toujours été sans fondement ; ces dispositions furent quelquefois l’effet d’une santé trop languissante ; peut-être aussi doit-on les attribuer à cette étude profonde qu’il avait faite du cœur humain, dans le cours de sa vie politique. « Malheur », a dit un sage, « malheur à l’homme sensible qui a osé déchirer le voile de