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LES RUINES.

À ces mots un violent murmure, élevé de toutes parts, interrompit l’orateur. « Quel est cet homme, s’écrièrent tous les groupes, qui nous outrage aussi gratuitement ? De quel droit prétend-il nous imposer sa croyance comme un vainqueur et comme un tyran ? Dieu ne nous a-t-il pas donné, comme à lui, des yeux, un esprit, une intelligence ? et n’avons-nous pas droit d’en user également, pour savoir ce que nous devons rejeter ou croire ? S’il a le droit de nous attaquer, n’avons-nous pas celui de nous défendre ? S’il lui a plu de croire sans examen, ne sommes-nous pas maîtres de croire avec discernement ?

« Et quelle est cette doctrine lumineuse qui craint la lumière ? Quel est cet apôtre d’un Dieu clément, qui ne prêche que meurtre et carnage ? Quel est ce Dieu de justice, qui punit un aveuglement que lui-même cause ? Si la violence et la persécution sont les arguments de la vérité, la douceur et la charité seront-elles les indices du mensonge ? »

Alors un homme s’avançant d’un groupe voisin vers l’imam, lui dit : « Admettons que Mahomet soit l’apôtre de la meilleure doctrine, le prophète de la vraie religion ; veuillez du moins nous dire qui nous devons suivre pour la pratiquer : sera-ce son gendre Ali, ou ses vicaires Omar et Aboubekre[1] ? »

  1. Ce sont ces deux grands partis qui divisent les musul-