Page:Vogüé - Jean d Agrève, 1898.djvu/122

Cette page n’a pas encore été corrigée
118
jean d’agrève.

bordées. Je désespérais ; nous n’arriverions jamais !

— Nous arriverons, disait le vieil homme, dressé aux longues patiences de mer. Nous arrivâmes. Je n’attendis pas longtemps. Une voiture fermée apparut sur la route, approcha, s’arrêta au môle. Était-ce possible ? Si sûr que je fusse d’Hélène, je n’osais pas croire, haletant dans l’angoisse du rêve d’où l’on va s’éveiller, qui ne peut pas être vrai, qui est trop beau. Je courus à la portière ; sans me soucier de nos braves gens, je baisai le marche-pied.

Elle descendit, simple, naturelle ; les yeux très grands et ravis dans l’étonnement du songe vu, elle aussi. D’un signe, elle montra au matelot son léger bagage ; et de ce pas certain, qui toujours vient droit à moi sans hâte, de ce pas où elle met toute la tranquille volonté de son cœur, — un pas dont on sent si bien qu’il ne rétrogradera jamais, — elle se dirigea vers la barque. Elle ne venait pas, elle revenait ; à son air, à sa démarche, un étranger l’eût prise pour une voyageuse qui rentrait dans ses chères habitudes de vie, dans la maison de son enfance.

Comme elle posait le pied sur la planche,