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perbe noblesse ! Et de même, est-ce que sa situation au sommet d’une colline boisée et riante n’a pas contribué à faire du théâtre moderne de Bayreuth une sorte de temple consacré à l’art de la musique et où les fidèles ne pénètrent qu’avec recueillement ?

Mais cela est si vrai que l’on a pu, non sans raisons sérieuses, affirmer que le choix de l’emplacement d’un théâtre, son architecture, étaient susceptibles de réagir sur la production même des œuvres dramatiques littéraires ou musicales[1]. Et, de fait, qui songerait à faire représenter une œuvre bouffe dans le cadre, solennel du théâtre d’Orange, et qui ne conçoit encore que la vue d’un tel amphithéâtre puisse éveiller dans l’âme d’un poète l’inspiration d’un grand drame tragique à la manière de Sophocle ?

Autant que les circonstances le permettent, tout théâtre doit être isolé des constructions voisines[2] ; il doit encore être installé dans un emplacement central, de façon à éviter de longues courses à la

  1. Il convient de remarquer avec M. Garnier que, « si une grande œuvre dramatique peut se produire sur n’importe quelle scène, d’un autre côté, cette production sera surtout sollicitée lorsque de grandes et belles salles seront édifiées, et que, dans une certaine mesure qu’il est bon de ne pas dédaigner, l’architecture des théâtres provoquera la création et le développement de la littérature dramatique en même temps qu’elle dirigera le goût public vers l’art élevé, puissant et moralisateur ». (Ch. Garnier, Le Théâtre. Paris, Hachette et Cie, in-8°, 1871, p. 19.)
  2. Cette dernière condition est rarement observée comme il faudrait. Le Grand Théâtre de Bordeaux fut le premier en France élevé en ces conditions, et, à Paris, le théâtre de l’Odéon fut longtemps le seul.