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au composé et sans abandonner un instant le principe admis tout d’abord, on nous permettra bien de sourire si nous voyons un architecte attendre l'inspiration, sans faire intervenir sa raison, qui seule, cependant, peut lui permettre d’imiter de bien loin cette marche logique suivie dans la création de notre globe, sans aller plus loin.

Certes, c’est un pauvre petit grain de poussière que notre globe, mais enfin nous y vivons, nous pouvons le voir, l’observer ; et si infime que soit l’objet dans l’immensité, nous reconnaissons que pour le former, la nature n’a pas mal raisonné. On voudra bien nous pardonner cette digression, qui d’ailleurs n’est qu’apparente, car ce que nous allons dire se rattache intimement à notre art, et surtout à notre art pendant la période du moyen âge.

Le problème à résoudre était celui-ci : « Étant donnée une masse sphérique, ou à peu près, à l’état de liquéfaction brûlante, la solidifier à la surface par voie de refroidissement, c’est-à-dire de retrait, de condensation, peu à peu, de manière à former autour du sphéroïde en fusion une croûte homogène et suffisamment résistante. »

C’est bien ici le cas de dire qu’avant le problème posé, la géométrie existe, car le problème est résolu suivant ses lois. Notons d’abord que la nature n’a pas trouvé l’introuvable, l’absurde, la quadrature du cercle. Elle a entre les mains les moyens que nous lui avons dérobés par l’observation de ses propres lois. Pour elle comme pour nous, un cercle est un cercle, et s’il faut revêtir un sphéroïde d’une croûte, d’une sorte de pavage solide, elle a procédé comme nous procéderions, par juxtaposition de corps se prêtant à cette fonction. La question était de trouver ce corps, ce corps unique, d’un seul échantillon, possédant les propriétés absolues de résistance. La nature est à l’œuvre, ses déductions s’enchaînent suivant un ordre d’une inflexible logique. Elle trace un cercle, (fig. 1.) ; une seule figure ne pouvant se déformer, dont les côtés et les angles soient égaux entre eux, par conséquent dont la résistance est égale sur quelque côté qu’on la place, s’inscrit dans ce cercle : c’est le triangle équilatéral. Elle prend une sphère, et dans cette sphère, par induction, elle inscrit une pyramide dont les quatre faces sont des triangles équilatéraux, c’est-à-dire un solide ne pouvant se déformer et dont les propriétés sont les mêmes, quelle que soit celle de ses quatre faces sur laquelle vous le posiez. Voilà le solide trouvé : côtés égaux, angles égaux, résistances égales. Avec cet échantillon, elle va former la croûte solide de la sphère incandescente. Et en effet ce solide peut se prêter à cette fonction.

Deux triangles équilatéraux ayant une base commune (voyez en A, fig. 2)