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beau, il faut qu’il participe de l’ensemble, et ne paraisse pas être un fragment posé au hasard sur un édifice.

Cependant il se faisait, vers 1160, dans l’art de la sculpture d’ornement comme dans la statuaire, une révolution. Les artistes se préparaient à abandonner entièrement ces influences, ces traditions qui jusqu’alors les avaient guidés ; influences, traditions conservées dans les cloîtres, véritables écoles d’art. De l’archaïsme, la statuaire passe, par une rapide transition, à l’étude attentive de la nature ; il en est de même pour la sculpture d’ornement. En prenant la tête des arts, les laïques semblent fatigués de cette longue suite d’essais plus ou moins heureux, tentés pour établir un art sur des éléments antérieurs. Dorénavant, instruits dans la pratique, ils vont puiser à la source toujours nouvelle de la nature. C’est précisément à l’époque des croisades de Louis le Jeune et de Philippe-Auguste, que l’on signale comme une renaissance des arts en Occident provoquée par l’influence orientale que les artistes français rejettent, soit dans le système d’architecture, soit dans la sculpture, toutes les influences orientales qui avaient eu, au commencement du XIIe siècle, une si grande action sur le développement de nos diverses écoles. Mais ce mouvement n’est pas général sur la surface du territoire des Gaules ; il ne se fait sentir que dans les provinces du domaine royal, en Bourgogne, en Champagne et en Picardie. La prédominance de l’art du Nord en France sur l’art du Midi est assurée à dater de ce moment. De même que la langue d’oïl tend chaque jour à réduire les autres dialectes français à l’état de patois, de même les écoles d’archi-