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ans après sa construction ; le chœur, élevé vers 1230, et presque entièrement détruit par un incendie, dut être repris, vers 1260, de fond en comble, sauf la chapelle de la Vierge, que l’on jugea pouvoir être conservée. Le maître de l’œuvre du chœur, ne se fondant que sur des maçonneries très-insuffisantes, avait cherché, par l’extrême légèreté de sa construction, à diminuer le danger d’une pareille situation ; et en ne considérant même le chœur de la cathédrale de Séez qu’à ce point de vue, il mériterait d’être étudié. Les chapelles profondes absidales, présentant des murs rayonnants étendus, se prêtaient d’ailleurs à une construction légère et bien empattée. En effet, les travées intérieures du sanctuaire sont d’une légèreté qui dépasse tout ce qui a été tenté en ce genre (voy. Travée), et la construction en élévation est des plus savantes ; cependant, rien ne peut remplacer de bonnes fondations ; vers la fin du XIVe siècle, on crut nécessaire de renforcer les contre-forts extérieurs du chœur ; mais ces adjonctions, mal fondées elles-mêmes, contribuèrent encore, par leur poids, à entraîner la légère bâtisse du XIIIe siècle, qui ne fit, depuis lors, que s’ouvrir de plus en plus. Au commencement de notre siècle, les grandes voûtes du sanctuaire s’écroulèrent ; il fallut les refaire en bois.

La façade de la cathédrale de Séez est couronnée par deux tours avec flèches élevées au commencement du XIIIe siècle et réparées ou reprises pendant les XIVe et XVe. Ces tours, ainsi que toute la nef, ont fait de très-sérieux mouvements, par suite de l’insuffisance des fondations. C’est aujourd’hui un monument fort compromis[1].

Nous ne quitterons pas la Normandie, sans parler des cathédrales de Bayeux et de Coutances.

La cathédrale de Bayeux, dont nous donnons le plan (37), est un édifice du XIIIe siècle enté sur une église du XIIe ; et, de l’église du XIIe siècle, il ne reste que les piles, les archivoltes et les tympans du rez-de-chaussée de la nef. Comme au Mans, comme à Séez, les transsepts sont simples, sans collatéraux ; à Bayeux, deux chapelles très-peu profondes, dont nous trouvons également la trace dans le mur oriental du croisillon sud de la cathédrale de Séez, s’ouvraient, à l’est, sur les deux transsepts nord et sud. C’est là un dernier souvenir des chapelles romanes des transsepts normands que l’on voit développées dans le plan primitif de la cathédrale du Mans (fig. 34). À Bayeux encore, dans le plan du chœur du XIIIe siècle, on voit les deux tours normandes (sur une petite échelle, puisqu’elles ne contiennent que des escaliers) qui terminaient la série des chapelles carrées avant les chapelles absidales[2]. Sur la façade, deux grands clochers romans

  1. De funestes restaurations furent entreprises sur la façade et autour de la nef de la cathédrale de Séez, de 1818 à 1849 ; elles n’ont fait qu’empirer un état de choses déjà fort dangereux. Des travaux, exécutés avec intelligence et soin depuis cette époque, permettent d’espérer que ce remarquable édifice pourra être sauvé de la ruine dont il est menacé depuis longtemps.
  2. Voir le plan du premier étage de la cathédrale de Chartres, où ce parti est largement développé.