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tecture plus anciens que tous ceux des autres parties de l’édifice ; ce portail fut cependant remanié vers 1250 ; le tympan et les voussures datent de cette époque et furent reposés après coup sur les pieds-droits et le trumeau du commencement du XIIIe siècle. La Vierge qui décore ce trumeau ne peut être antérieure à 1250 ; le trumeau fut lui-même alors doublé à l’intérieur, afin de recevoir une décoration en placage qui n’existait pas dans l’origine.

Le plan de la cathédrale d’Amiens n’indique pas que les premiers maîtres de l’œuvre aient eu la pensée d’élever, comme à Chartres, à Laon et à Reims, quatre tours aux angles des transsepts ; de sorte que nous voyons aujourd’hui la cathédrale d’Amiens à peu près telle qu’elle fut originairement conçue, si ce n’est que les deux tours de la façade eussent dû avoir une base plus large et une beaucoup plus grande hauteur. Cependant on remarque sur ce plan les escaliers posés à l’extrémité des doubles bas-côtés du chœur, et précédant les chapelles. Ces escaliers sont comme un dernier reflet des tours placées sur ces points dans les églises normandes, et qui, comme nous l’avons dit, se voient encore à Chartres. Nous les retrouvons dans les cathédrales de Beauvais, de Cologne, de Narbonne, de Limoges, qui sont toutes des filles de la cathédrale d’Amiens. Du côté du nord s’élevaient les anciens bâtiments de l’évêché, qui étaient mis en communication avec la cathédrale par la grande porte du pignon septentrional et par une petite porte percée sous l’appui de la fenêtre de la première travée du bas-côté. Sur le flanc nord du chœur était placée une sacristie avec trésor au-dessus. Un cloître du XIVe siècle, dans les galeries duquel on entrait par les deux chapelles A et B, pourtournait le rond-point irrégulièrement, en suivant les sinuosités données par d’anciens terrassements. En D sont placées des dépendances et une chapelle, ancienne salle capitulaire qui date également de la première moitié du XIVe siècle. Ce cloître et la chapelle étaient désignés sous la dénomination de cloître et chapelle Macabre, des Macabrés, et, par corruption, des Machabées. Les arcades vitrées de ce cloître, ou peut-être les murs, étaient probablement décorés autrefois de peintures représentant la danse macabre[1].

Voici (20) la coupe transversale de la nef de cette immense église, la plus vaste des cathédrales françaises, dont le plan couvre une surface, tant vides que pleins, de 8 000 mètres environ[2]. Il est intéressant de comparer les deux coupes transversales des cathédrales de Reims et

  1. De ces dépendances, il ne reste aujourd’hui que la chapelle qui sert de grande sacristie ; elle est décorée par une belle tribune en bois sculpté de la fin du XVe siècle. Une portion du cloître a été reconstruite depuis 1848, ainsi que le petit bâtiment placé en D. Les restes anciens étaient en ruine.
  2. Le plan de la cathédrale de Cologne terminée couvre une surface de 8 900 m, environ ; celui de la cathédrale de Reims une surface de 6 650 mètres ; celui de la cathédrale de Bourges une surface de 6 200 mètres ; celui de la cathédrale de Paris une surface de 5 500 mètres.