Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 2.djvu/288

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[cat]
— 285 —

vers 1225, Périgueux, Angoulême, Limoges, Tulle, Cahors, Agen, gardent leurs vieux monuments.

À la mort de Philippe le Bel, en 1314, le domaine royal s’est étendu : il a englobé la Champagne ; il possède le Languedoc, le marquisat de Provence ; il tient l’Auvergne et la Bourgogne au milieu de ses provinces. Montpellier, Carcassonne, Narbonne, Lyon, exécutent dans leurs cathédrales des travaux considérables et tentent de les renouveler. Clermont en Auvergne cherche à suivre l’exemple. Les provinces anglaises et la Provence résistent seules.

À la mort de Charles V, en 1380, les Anglais ne possèdent plus que Bordeaux, le Cotentin et Calais ; mais la séve est épuisée : les cathédrales dont la reconstruction n’a pas été commencée pendant le XIIIe siècle demeurent ce qu’elles étaient ; celles restées inachevées se terminent avec peine.

Nous avons essayé de tracer sommairement un historique général de la construction de nos cathédrales françaises ; si incomplet qu’il soit, nous espérons qu’il fera comprendre l’importance de ces monuments pour notre pays, de ces monuments qui ont été la véritable base de notre unité nationale, le premier germe du génie français. À nos cathédrales, se rattache toute notre histoire intellectuelle ; elles ont abrité, sous leurs cloîtres, les plus célèbres écoles de l’Europe pendant les XIIe et XIIIe siècles ; elles ont fait l’éducation religieuse et littéraire du peuple ; elles ont été l’occasion d’un développement dans les arts qui n’est égalé que par l’antiquité grecque. Si les derniers siècles ont laissé périr dans leurs mains ces grands témoins de l’effort le plus considérable qui ait été fait depuis le christianisme en faveur de l’unité, espérons que, plus juste et moins ingrat, le nôtre saura les conserver.

Puisque nous prétendons démontrer que la cathédrale française, dans le sens moral du mot, est née avec le pouvoir monarchique, il est juste que nous commencions par nous occuper de celle de Paris ; d’ailleurs, c’est la première qui ait été commencée sur un plan vaste destiné à donner satisfaction aux tendances à la fois religieuses et politiques de la fin du XIIe siècle.

La cathédrale de Paris se composait, en 860, de deux édifices, l’un du titre de Saint-Étienne, martyr, l’autre du titre de Sainte-Marie ; nous ne savons pas quelles étaient les dimensions exactes de ces monuments, dont l’un, Saint-Étienne, fut épargné par les Normands moyennant une somme d’argent. Les fouilles qui furent faites au midi, en 1845, laissèrent à découvert un mur épais qui venait se prolonger, en se courbant, sous les chapelles actuelles du chœur. La portion visible du cercle donne lieu de croire que l’abside de cette première église n’avait guère plus de huit à neuf mètres de diamètre. En 1140 environ, Étienne de Garlande, archidiacre, fit faire d’importants travaux à l’église de la Vierge. De ces ouvrages, il ne reste plus que les bas-reliefs du tympan et une portion des voussures de la porte Sainte-Anne, replacés au commencement du