Page:Viollet-le-Duc - Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle, 1854-1868, tome 1.djvu/199

Cette page a été validée par deux contributeurs.
[arc]
— 180 —

verture). Mais les grandes nefs de ces églises ne pouvaient être éclairées par des jours directs, elles étaient obscures dans leur partie supérieure, ainsi on se trouvait toujours entre ces deux inconvénients, ou d’éclairer les nefs par des fenêtres ouvertes au-dessus des voûtes des bas côtés, et alors de couvrir ces nefs par des charpentes apparentes, ou de les voûter et de se priver de jours directs.

Tous ces monuments étaient élevés dans des conditions de stabilité telles, qu’ils sont parvenus jusqu’à nous presque intacts. Ces types se perpétuaient pendant les XIe et XIIe siècles avec des différences peu sensibles dans le centre de la France, dans le midi, l’ouest, et jusqu’en Bourgogne. Dans l’Île-de-France, la Champagne, la Picardie, dans une partie de la Bourgogne et en Normandie, les procédés pour construire les édifices religieux prirent une autre direction. Ces contrées renfermaient des villes importantes et populeuses ; il fallait que les édifices religieux pussent contenir un grand nombre de fidèles ; la basilique antique, aérée, claire, permettant la construction de larges nefs séparées des bas côtés par deux rangées de colonnes minces, satisfaisait à ce programme.

En effet, si nous examinons (fig. 15) la coupe d’une basilique construite suivant la tradition romaine, nous voyons une nef A, ou vaisseau principal, qui peut avoir de dix à douze mètres de largeur, si nous subordonnons cette largeur à la dimension ordinaire des bois dont étaient formés les entraits ; deux bas côtés B de cinq à six mètres de largeur, éclairés par des fenêtres G ; au-dessus deux galeries C permettant de voir le sanctuaire, et éclairées elles-mêmes par des jours directs, puis pour éclairer la charpente et le milieu de la nef, des baies supérieures E percées au-dessus des combles des galeries. Cette construction pouvait être élevée sur un plan vaste, à peu de frais. Mais, nous l’avons dit, il fallait à ces populations des édifices plus durables, d’un aspect plus monumental, plus recueilli ; et d’ailleurs à la fin du Xe siècle les Normands n’avaient guère laissé d’édifices debout dans les provinces du nord de la France. On songea donc dès le XIe siècle à reconstruire les édifices religieux sur des données nouvelles, et capables de résister à toutes les causes de ruine. Le système de la voûte d’arête romaine formée par la pénétration de deux demi-cylindres d’un diamètre égal, n’avait jamais été abandonné ; aussi fut-il appliqué aux édifices religieux, du moment que l’on renonça aux charpentes ; mais ce système ne peut être employé que pour voûter un plan carré ; or dans le plan de la basilique latine, le bas côté seul présente un plan carré à chaque travée ;