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lorsque dans les flots plombés du Nil s’assourdissait le bruit des rames de la barque impériale, quand l’air s’imprégnait des senteurs exhalées par les immenses floraisons que les esclaves nubiens plantaient autour de la vallée des tombeaux, — et que sur les hautes pyramides argentées par les nuits orientales brillaient, comme des phares du désert, les inscriptions des mages d’Osiris ; — lorsque les caravanes chargées de myrrhe, de gomme, de camphre et d’or, et venues de la Bactriane ou de la Perse, passaient confusément, au loin, dans l’étendue, avec leurs torches, leurs éléphants, leurs richesses et leurs esclaves ; lorsque, — à travers un mirage de sables, de verdures et d’étoiles, — le vent s’embaumait dans le feuillage des cèdres et des palmiers ; quand les phénix immortels volaient sur les sépulcres des pharaons ; enfin, lorsque le monde fut riche une fois dans sa vie, souvent, dès la tombée de la nuit, souvent la belle reine de l’Heptanomide antique aimait à s’attarder sur le fleuve.

Alors, depuis les piliers d’Hercule jusqu’aux steppes boréales, le monde, avec ses peuples, ses