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aux turbans rouges, et des troupes aux sandales de fer descendaient les collines : le reine viendrait, sans doute, par la route de Surate ; elle entrerait par la porte principale des citadelles, laissant camper ses armées dans les villages environnants.

Déjà, dans Bénarès, au profond e l’allée des Pyram-vâda, des torches couraient sous les térébinthes ; les esclaves royaux illuminaient de lampes, en hâte, l’immense palais de Séür.

La population cueillait des branches triomphales et les femmes jonchaient de larges fleurs l’avenue du palais, transversale à l’allée des Richis, s’ouvrant sur la place de Kama ; l’on se courbait, par foules, à de fréquents intervalles, en écoutant frémir la terre sous l’irruption des chars de guerre, des fantassins en marche et des flots de cavaleries.

Soudain, l’on entendit les sourds bruissements des tymbrils mêlés à des cliquetis d’armes et de chaînes — et, brisées par les chocs sonores des cymbales, les mélopées des flûtes de cuivre. Et voici que, de toute part, des cohortes d’avant-garde entraient dans la ville, enseignes hautes, exécutant, en désordre, les commandements vociférés par leurs sowaris.

Sur la place de Kama, l’esplanade de la porte de surate était couverte de ces fauves tapis d’Irmensul — et des lointaines factures d’Ypsamboul — tissus aux bariolures éteintes, importés par les caravanes annuelles des marchands touraniens qui les échangeaient contre des eunuques.