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d’Éphrata sur la Judée sanglante, le soir des Innocents.

Sans force, même pour se prosterner, éperdu sous le regard invisiblement torride qui brûlait sa vie sans délier son âme, le Grand-Médiateur s’écria :

— Postérité de David, cache-moi de ses deux yeux !

Et, comme le silence du Maître-des-Prodiges pouvait signifier :

— Où l’Homme peut-il fuir la présence d’Azraël ?

Helcias, rassemblant ses plus anciens souvenirs, tendit les mains vers le Roi et murmura suppliant :

Il est, dans les bois vastes et sombres, aux bords de l’Euphrate, une clairière dévastée où, pendant la première nuit du monde, se recueillit le Serpent.

Le Roi, devinant l’obscure pensée du vieillard, lui toucha le front de son anneau constellé :

— Va !… dit-il.

Helcias disparut dans une fulguration.



Alors Salomon descendit de son trône et marcha vers Azraël.

Et sa tunique de pierreries traînait sur le pelage bigarré des lynx assoupis, sur les glaives sans rayons des guerriers étendus. À travers les groupes des blanches épouses d’autrefois et des négresses habiles