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ET LA PATIENCE.

sur la promesse de la vieille, qui l’assura que le Tyran goûteroit ce jour-là du sang de Merille pour la derniere fois, & que le lendemain elle le lui livreroit. Le Prince avoit bien de la peine à se résoudre de laisser supporter encore cette attaque à sa chere cousine, que la foiblesse dont elle étoit lui faisoit appréhender qui ne lui fût mortelle. Mais la vieille le rassura, en lui disant que cette Princesse avoit encore des forces pour plus de trois semaines, lui représentant qu’elle devoit s’y connoître, puisque, depuis qu’elle étoit dans ce Palais, elle y avoit vu périr plus de cent jeunes filles ; mais qu’avant de terminer leurs tristes jours, elles avoient été bien plus accablées que n’étoit Merille.

Cette assurance, & l’espérance prochaine que la vieille leur donnoit, déterminerent Benga à suivre ses conseils ; elle y ajoutoit, pour les rendre plus agréables, qu’elle avoit une essence qui rétabliroit les forces de sa maîtresse, quand elle n’auroit plus qu’une heure à vivre ; & que, si elle ne lui en donnoit pas actuellement, c’étoit pour ne pas renouveller le sang, & lui rendre sa vigueur, parce que, s’il circuloit plus vivement, il en couleroit davantage dans l’estomac glouton d’Angoul-