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ET LA PATIENCE.

mais, ajouta-t-elle, en imaginant que cette occasion seroit favorable à Benga, pourquoi ne me donnez-vous pas l’aide de quelque jeune garçon vigoureux, à qui vous conserveriez la vie, & qui seroit trop heureux de l’employer à votre service, en se rachetant à ce prix ? Vous devez croire que l’impossibilité de se sauver, l’obligeroit à vous servir fidèlement. L’occasion d’en trouver seroit moins rare que celle d’avoir des femmes, d’autant qu’un Esclave pourroit vous secourir, en cas que quelqu’un entreprît de vous venir attaquer & de détruire vos enchantements.

Je n’ai pas besoin de secours, & je n’appréhende rien, repartit le Géant ; il n’est aucune Puissance sur la terre, qui, tant que je vivrai, puisse détruire malgré moi la forme de mon troupeau, puisque l’on ne peut la lui rendre humaine, qu’en les peignant avec une de mes mâchoires : juge, poursuivit-il, en riant d’un air assuré, si je serai assez complaisant pour consentir que quelqu’un mette le secret en pratique.

Cela est très-heureux, reprit la vieille ; cependant je craindrois, à votre place, que quelque Etranger, vous surprenant hors de chez vous, ne vous jouât un mauvais tour : je les en défie, lui dit-il. Quoi ! repartit-elle, seriez-vous invulné-