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LE TEMPS

poir, elle se frappa la tête sur le carreau ; mais faisant réflexion que sa force ne secondoit pas son courage, & qu’elle se mettroit seulement en un état qui lui ôteroit le pouvoir de se priver du jour, elle cessa de se maltraiter, & résolut de se précipiter à la vue de ses freres. Le ruisseau qui arrosoit la prairie où ils étoient, parut tout propre à lui rendre ce funeste service. Il est juste, disoit-elle, ne pouvant accuser de leur perte que moi, qu’ils connoissent que, loin de songer à leur survivre, je cherche à les prévenir.

L’arrivée de l’Esclave interrompit ses lugubres pensées ; & le dessein qu’elle venoit de former, lui rendant une espece de tranquillité, elle écouta ce que cette femme lui disoit avec une docilité apparente, qui l’empêcha de soupçonner son funeste dessein.

Ses agitations s’étant un peu calmées, le sommeil, qui la fuyoit depuis trois jours qu’elle étoit entrée dans ce dangereux Palais, vint enfin la saisir ; & l’accablement où elle étoit ne lui permettant pas d’y résister, elle s’y abandonna sans s’en appercevoir.

A peine fut-elle assoupie, qu’il lui sembla qu’elle voyoit la Patience, qui, se présentant à elle, lui disoit d’un ton où la