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ET LA PATIENCE.

mes venant fort rarement à ce Palais, surtout les vieilles, il n’en trouveroit de long-temps par qui faire remplir la place, & que cependant elle lui étoit nécessaire. Ces raisons le firent consentir enfin à lui laisser Merille pour la soulager ; mais ne voulant pas se priver entiérement d’un mêts si délicat, il dit à la bonne femme qu’il la lui abandonnoit, à condition toutefois qu’il suceroit le petit doigt de cette jeune fille tous les jours ; & commençant à l’instant à mettre son doigt dans sa bouche, il la tetta pendant sept minutes, après quoi il la lui remit, leur promettant même de ne pas entrer dans leur chambre, & de se contenter qu’elle lui donnât le doigt par-dessous la porte.

Elles furent fort satisfaites d’en être quittes à si bon marché, sur-tout la Princesse, qui ne sentoit pas la conséquence d’avoir un tel nourrisson, & qui regardoit cette fantaisie comme une folie ridicule sans nul danger, mais qui étoit pourtant fort épouvantée de se voir prisonniere dans un endroit si extraordinaire : Où suis-je, ma bonne mere, disoit-elle à l’esclave, en la soutenant, pour mieux persuader son incommodité, & quelle sera la fin de ceci ?

Elle sera triste, lui répondit cette bonne femme ; car je vous avoue, ma chere Prin-