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LE TEMPS

Alors ses remords augmentant jusqu’à ne lui point laisser de repos, elle se détermina à courir les risques de la punition, & elle demanda audience à la Reine : l’ayant obtenue, cette femme se jetta à ses pieds en fondant en larmes, qu’un sincere repentir tiroit de ses yeux : Je ne sollicite point la clémence de Votre Majesté, grande Reine, lui dit-elle, je mérite de partager le supplice du perfide Mouba ; lui & moi sommes plus coupables cent fois que vous ne le pouvez imaginer ; mais, pour votre propre intérêt, j’ose vous supplier de faire suspendre sa mort, & même de lui faire espérer le pardon de tous ses crimes, pourvu qu’il le veuille acheter par l’aveu sincere d’un secret dont je ne fais que le commencement, où cependant j’ai une part qui m’a déja accablée de repentir, & qui me fait regarder la perte de la vie comme le seul bien capable de me délivrer des serpents intérieurs qui me déchirent le sein.

L’air égaré & le désespoir de cette femme, joints à la douleur qu’elle paroissoit avoir d’une faute dont il ne se présentoit d’autres accusateurs qu’elle-même, & dont elle témoignoit tant de remords, redoublerent l’étonnement de la Reine, qui partageoit avec les Princes d’Angole la cu-