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LE TEMPS

fermant dans un endroit si sûr, qu’il me fut impossible de leur échapper. Je réclamai envain le droit des gens ; ma dignité d’Ambassadeur ne fut point respectée par ces furieux. Vous pouvez, grande Reine, & vous, Princes généreux, vous imaginer quel fut l’excès de ma douleur en me voyant hors d’état de pouvoir servir mon auguste Maîtresse : je passai de la sorte un temps considérable, & d’autant plus cruel, que je le regardois comme très-précieux, ne doutant point que Mouba ne le mît à profit pour continuer à s’affermir dans son usurpation. J’étois en cette affreuse circonstance, lorsque le Roi mourut : il étoit vieux, & le chagrin acheva de terminer sa carrière. La Reine, son épouse, assistée de son frère, eut l’audace de vouloir prendre les rênes du Gouvernement, mais elle ne réussit pas dans son projet. Ce frere s’étant témérairement exposé à sortir de son asyle, fut mis en pieces : on s’assura de la veuve du Roi, & un frere de la feue Reine, mere de Benga, se saisit de la puissance souveraine au nom de son Neveu, en protestant à la face des Dieux, que ce n’étoit que pour la lui conserver. Comme ce Prince est juste & pieux, on ne doute pas à Bengal que son dessein ne soit tel qu’il l’exprime. Les Bengalois,