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LE TEMPS

ment où elle les apperçut, étoit positivement celui où ils étoient occupés à lui faire respirer les liqueurs fortifiantes auxquelles elle devoit le retour de ses sens.

Un tel excès de générosité acheva de la pénétrer, en lui faisant sentir toute l’étendue de l’injustice dont elle les avoit rendus les victimes depuis tant d’années, & lui causa une confusion qui pensa la faire retomber dans l’état d’où ils la venoient de tirer.

Quoi, Seigneurs, leur dit-elle, en essayant à se lever & à se prosterner à leurs pieds, c’est à vous que je suis redevable d’une vie que je méritois de perdre ? Ah ! vos généreux procédés augmentent la honte & les remords qui vont en être inséparables. Hélas ! grands Princes, poursuivit-elle, que vous êtes magnanimes, & que je suis criminelle ! j’ai mérité la mort dont vous venez de me préserver, non pour le crime que l’on osoit m’imputer avec tant d’injustice, mais pour les fautes que j’ai réellement commises envers vous. L’équité exigeoit que pour l’honneur d’un nom qui vous doit être respectable, & qui vous intéresse, vous daignassiez me justifier d’une action infame, qui offensoit la mémoire de votre auguste Pere, & dont la honte retomboit sur sa