Page:Villeneuve - Le Temps et la patience, tome 2.djvu/143

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
137
ET LA PATIENCE.

parfaite ressemblance ne fit que changer l’objet de sa passion, le flattant de plus, que si Zerbeke avoit été celle qu’il osoit contrefaire, il lui auroit inspiré les mêmes feux pour lui qu’il ressentoit pour elle.

Cependant cette intrigue étoit trop importante au repos de Mouba, pour la laisser conduire plus long-temps dans le secret ; & voulant en savoir davantage, il trouva le moyen, par l’assistance de sa confidente, de se cacher dans l’appartement de la Reine, d’où, sans être apperçu, il vit cette Princesse, qui, se plaçant sur un sopha, & Zerbeke à ses pieds ; se croyant seule avec lui, parloit sans se contraindre.

Que deviendrons-nous donc enfin, mon cher Zerbeke, lui disoit-elle ? Je ne vois point d’apparence que nos malheurs finissent : il est vrai que ton heureux stratagême les a suspendus depuis bien du temps ; mais cela ne peut pas toujours durer, & il faudra que le Tyran se désabuse malgré nous. Je crains à tout moment que cet instant fatal n’arrive : hélas ! ajouta-t-elle, en soupirant, ton beau-pere, qui me témoignoit un zele si sincere, nous a-t-il donc entiérement abandonnées, & ne m’aime-t-il plus, parce que je suis malheureuse ?