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LE TEMPS

Vous avez bien instruit votre fille, Reine, lui dit-il, mais vous n’avez pas consulté la prudence en lui permettant de dépeindre les alliances entre les Souverains & leurs Sujets, avec des couleurs aussi horribles ; vous oubliez sans doute que c’est déshonorer la mémoire du feu Roi, en rappellant au souvenir de l’assemblée la bassesse qu’il commit lorsqu’il vous épousa, & qu’il vous tira d’un état plus au-dessus du sien que je ne le suis à présent du vôtre. Mais, continua-t-il, avec la même arrogance, s’il y a quelque chose qui puisse rapprocher les distances, c’est la capacité pour se soutenir honorablement dans une place si éminente : vous ne disconviendrez pas, je crois, que ce talent ne vous appartient pas, ou que, si vous l’avez, c’est par la science infuse, n’ayant apparemment pas eu occasion d’apprendre l’art de regner en balayant les cuisines du Palais, d’où le sort vous a tirée par un effet de son caprice, lorsqu’il voulut vous placer sur le Trône.

La Reine sentit vivement tout ce que cette superbe réponse avoit de choquant, mais elle n’y repartit point ; il n’en fut pas de même de Zerbeke ; il en fut si irrité, que se retournant fiérement : Tais-toi, insolent, lui dit-il, n’abuse pas da-