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» Je ne sais, mais depuis l’heure qui te vit naître,
» Dans tout être créé j’ai cru te reconnaître[1] ;
» J’ai trois fois en pleurant passé dans l’Univers[2],
» Je te cherchais partout, dans un souffle des airs.
» Dans un rayon tombe du disque de la lune,
» Dans l’étoile qui fuit le ciel qui l’importune,
» Dans l’arc-en-ciel, passage aux Anges familier[3].
» Ou sur le lit moelleux des neiges du glacier ;
» Des parfums de ton vol je respirais la trace ;
» En vain j’interrogeai les globes de l’espace.
» Du char des astres purs j’obscurcis les essieux[4],
» Je voilai leurs rayons pour attirer tes yeux,
» J’osai même, enhardi par mon nouveau délire[5],
» Toucher les fibres d’or de la céleste lyre.
» Mais tu n’entendis rien, mais tu ne me vis pas.
» Je revins à la Terre, et je glissai mes pas
» Sous les abris de l’homme où tu reçus naissance.
» Je croyais t’y trouver protégeant l’innocence,
» Au berceau balancé d’un enfant endormi[6].
» Rafraîchissant sa lèvre avec un souffle ami ;
» Ou bien comme un rideau développant ton aile,

  1. Var : M’, (J’ai biffé) Dans tout être créé j’ai cru revoir ton être ; (corr. : te reconnaître ; )
  2. Moore, A. d. A., p. 35 : Je parcourais soir et matin les lignes radieuses qui s’étendent comme des réseaux d’or entre les étoiles et le soleil, déliant tous ces rayons de lumière…
  3. Var : O, anges
  4. Var : M1, 1er main, Aux constellations j’apportai d’autres cieux, 2e main, texte actuel.
  5. Var v. 69-70 : M’, J’osai même (long biffé) toucher dans (corr. : enhardi par) mon nouveau délire, | Toucher les fibres lumineux (corr. : d’or) de la céleste lyre.
  6. Var : M1, Dans les cheveux bouclés d’un enfant endormi,