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Ses cheveux étaient noirs, mais pressés d’un bandeau ;
C’était une couronne ou peut-être un fardeau :
L’or en était vivant comme ces feux mystiques
Qui, tournoyants, brûlaient sur les trépieds antiques.
Son aile était ployée, et sa faible couleur
De la brume des soirs imitait la pâleur[1].
Des diamants nombreux rayonnent avec grâce
Sur ses pieds délicats qu’un cercle d’or embrasse[2] ;
Mollement entourés d’anneaux mystérieux.
Ses bras et tous ses doigts éblouissent les yeux[3].
Il agite sa main d’un sceptre d’or armée[4],
Comme un roi qui d’un mont voit passer son armée[5],
Et, craignant que ses vœux ne s’accomplissent pas,
D’un geste impatient accuse tous ses pas.
Son front est inquiet ; mais son regard s’abaisse,

  1. Var : M, 1er main, D’un brouillard tran (le vers est resté en suspens) 2e main, texte actuel.
  2. Var v. 73-74 : M, 1er main, Le diamant en feu dans l’or pur étincelle | (mots illisibles) des pieds que la pourpre décèle ; 2e main, Des diamants nombreux rayonnent avec grâce | Sur chacun de ses pieds qu’un cercle d’or surmonte (corr. : enlace) ;
  3. Var v. 75-76 : M, 1er main, Tous ses doigts et ses bras (blancs biffé) souples et gracieux | Brillent environnés d’anneaux mystérieux. 2e main, Ses bras et tous ses doigts éblouissent les yeux, | Et brillent entourés d’anneaux mystérieux.
  4. Lewis, Le Moine, ch. VII (portrait de Satan) : Il était entièrement nu : une étoile brillante étincelait sur son front, deux ailes cramoisies se déployaient de ses épaules, et ses boucles soyeuses étaient pressées par un bandeau de mille feux colorés, qui se jouaient autour de sa tête, prenaient toutes les formes, et resplendissaient d’un éclat bien supérieur à celui des pierres précieuses. Des anneaux de diamant entouraient ses bras et ses chevilles, et, dans la main droite, il tenait un rameau d argent en forme de myrte... Enchanté d’une vision si contraire à son attente, Ambrosio contemplait l’esprit avec ravissement et surprise ; mais, si belle que fût cette figure, il ne put s’empêcher de remarquer un égarement dans les regards du démon, et une mystérieuse mélancolie imprimée sur ses traits, qui trahissaient l’ange déchu, et inspiraient aux spectateurs une frayeur secrète.
  5. Var : O, Roi M, qui d’en haut O, Armée,