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manuscrits, mais aussi purs et aussi corrects que j’aurai pu le faire, les ouvrages que je veux laisser après moi, et que je croirai dignes de voir le jour. Je brûlerai les autres ; comme aussi, pour ces mémoires que j’écris, si je ne puis les corriger à mon gré, il faudra bien que je les brûle. Mais pour terminer gaiement ces sérieuses bagatelles, et montrer comment déjà j’ai fait le premier pas dans la cinquième époque de ma vie, celle de la seconde enfance, je veux divertir le lecteur en lui confiant ma dernière faiblesse de la présente année 1803. Depuis le moment où j’ai fini de mettre en vers mes comédies, et où j’ai pu les croire achevées et point trop indignes de vivre, il m’a paru de plus en plus que j’étais appelé à jouer un certain personnage dans la postérité. Ensuite depuis qu’à force de persévérance dans l’étude du grec, je me suis vu ou ai cru me voir capable d’entendre à livre ouvert Pindare, les Tragiques, surtout le divin Homère, capable même de les traduire littéralement en latin, et dans un italien passable, je me suis senti orgueilleux d’une telle victoire, remportée de quarante-sept à cinquante-quatre ans. L’idée alors m’est venue que toute peine méritant sa récompense, je devais m’en accorder une, et me la faire belle, honorifique et non lucrative. J’inventai donc un collier où seraient gravés les noms de vingt poètes, anciens et modernes, et auquel serait suspendu un camée avec le portrait d’Homère, et portant au revers (riez, lecteurs) un distique grec de ma façon, que je donne ici dans une dernière note, traduit