Page:Victoire de Donnissan de La Rochejaquelein - Mémoires de Madame la marquise de La Rochejaquelein, 1889.djvu/190

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cheval depuis trois mois, j’envoyai chercher ma fille, que sa nourrice avait cachée, depuis la déroute de Fontenay, dans la brave paroisse de Courlay, chez les Texier, vaillants paysans ; elle ne pouvait venir en un jour à la Boulaye, je ne pus résister au désir d’aller au-devant d’elle à la Pommeraie-sur-Sèvre, chez l’excellent et vertueux médecin Durand[1], à trois petites lieues de la Boulaye. Je fus obligée d’y aller à cheval ; je mourais de peur, quoique j’eusse un homme à pied qui tenait la bride. Le lendemain j’étais à dîner, quand je vis arriver un courrier pour m’apprendre, ce qu’on m’avait caché, la blessure de M. de Lescure ; il venait d’arriver à la Boulaye et m’écrivait lui-même pour me rassurer. Un tremblement général me saisit, et je voulus partir sur-le-champ ; je sautai sur un mauvais petit cheval qui se trouva là par hasard ; je ne donnai seulement pas le temps d’arranger les étriers, dont l’un était d’un demi-pied plus long que l’autre ; je pris un galop si abandonné que, passant près d’un arbre et ne sachant pas mener, la bête, je faillis m’écraser le genou et n’eus que le temps de passer ma jambe du même côté que l’autre sans m’arrêter ; les paysans dans les champs me croyaient emportée ; j’arrivai par la grosse chaleur en moins de trois quarts d’heure. Depuis ce jour je n’ai plus eu peur à cheval. Je trouvai M. de Lescure debout, mais avec la fièvre ; il la garda plusieurs jours.

M. le chevalier Charles d’Autichamp vint rejoindre l’armée de M. de Bonchamps, son cousin germain, et bientôt il la commanda en second sous M. de Fleuriot. Il y avait aussi un officier fort estimé, M. de Piron[2], Breton. M. de la Guéri-

  1. Pierre-Marie Durand, mort à la Pommeraie-sur-Sèvre le 29 novembre 1820, à l’âge de soixante-dix-neuf ans.
  2. Les biographes croient que M. de Piron (de la Varenne ?) était du pays d’Ancenis. Il ne nous a pas été possible de découvrir son origine ni de constater son identité. On dit qu’il avait d’abord émigré et avait servi dans les chevau-légers à l’armée des princes. Il fut pris après la déroute de Savenay et fusillé à Blain. C’était un des officiers les plus distingués et les plus brillants de la Vendée.