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sur Saumur, abandonnant quelques canons, mais ayant perdu peu de monde[1]. Là nous fûmes rejoints par M. de Boispréau, qu’on avait mis de force fourrier dans les hussards ; il fit semblant de vouloir défier les Brigands et déserta en présence des deux armées, au moment où elles allaient se battre. C’était un jeune homme léger, mais plein d’esprit et de bravoure. L’armée devait aller de Doué à Saumur ; outre que le chemin était plus difficile à cause du passage de la petite rivière du Thoüet, mon père représenta qu’il y avait six à huit mille hommes à Thouars, qui ne manqueraient pas de se rendre sur-le-champ au secours de Saumur ; qu’ils y entreraient avant notre attaque, ou bien nous chargeraient par derrière pendant la bataille, et nous mettraient entre deux feux. Il proposa donc de gagner Montreuil-Bellay, entre Thouars et Saumur ; il dit qu’on couperait toute communication entre ces deux villes, et qu’on surprendrait les Bleus venant de Thouars, par cette contre-marche ; que d’ailleurs on s’emparerait en même temps d’un pont situé à une lieue de Saumur, sur cette même petite rivière du Thouet.

On déféra à cet avis : l’armée fut à Montreuil ; cette ville est sur une hauteur ; il y a une grande porte en face du chemin de Thouars ; mon père la fit fermer, fit ranger derrière une quantité de canons chargés à mitraille et défendre à qui que ce fût de sortir de la ville de ce côté. Tout arriva comme il l’avait prévu. Les Bleus, à qui on avait commandé de se rendre à Saumur dans la nuit, avancèrent en désordre à la hâte, et, sans la moindre défiance, montèrent la hauteur jusqu’à la porte[2].

  1. L’armée vendéenne s’acharna, malgré le mauvais temps, à poursuivre les républicains ; on les eût suivis jusqu’à Saumur, sans le feu des redoutes de Bournan, qui força les Vendéens de rétrograder ; ils revinrent coucher à Doué. Deux hussards républicains désertèrent ; comme ils n’inspiraient pas une grande confiance, on les désarma ; depuis ils ont très bien servi dans la cavalerie, et s’attachèrent à M. le prince de Talmond. M. de Boispréau était l’un d’eux. (Note du manuscrit.)
  2. Les républicains arrivèrent à Montreuil entre sept et huit heures ; ils étaient commandés parle général Salomon. (Note du manuscrit.)