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guerre, se déclara évêque et témoigna son désir de se dévouer pour l’armée catholique. Donna-t-il des preuves de ce qu’il avançait ? Je ne l’ai jamais su et je ne le crois pas ; mais plutôt, son extérieur et ses propos inspirèrent-ils confiance aux officiers qui le crurent sans beaucoup d’examen et de réflexion ? Ceci est plus probable ; toujours est-il qu’il fut reçu à bras ouverts ; on convint qu’il se rendrait à Châtillon, où il serait reconnu comme évêque. Il y entra le jour de la déroute de Fontenay ; nous ne concevions rien à ce que nous disaient les paysans, et de la déroute et de l’arrivée d’un évêque. Toutes les cloches furent en branle à Châtillon, le peuple ivre de joie courut au devant de lui ; il distribua ses bénédictions, et les soldats oublièrent la défaite pour ne plus penser qu’à l’arrivée de Monseigneur.

[Cependant l’abbé Brin lui fit sur son épiscopat plusieurs questions qui témoignaient de l’inquiétude et de l’incertitude. M. Guillot répondit qu’il avait été sacré pour aller en Amérique ; mais, comme il se trouvait dans l’Ouest, un évêque du pays lui demanda de se charger de son diocèse. À la Boulaye et dans d’autres endroits, il assura que le Pape l’avait nommé vicaire apostolique pour la France.]

Ici je répondrai à une idée que pourraient avoir plusieurs personnes, que c’était un jeu joué par les généraux ; mais si on réfléchit à leur caractère, tel que je l’ai dépeint, aucun évidemment n’en était capable ; de plus, il n’y avait pas encore de généralissime, tout était en désordre à l’armée. Sûrement on a vu des chefs de parti inventer des impostures, mais ici c’était une révolte spontanée, imprévue ; la plupart des généraux ne se connaissaient pas entre eux ; les officiers agissaient tous sans ordres, comme les soldats ; d’ailleurs, c’eût été un trait bien hardi, bien déplacé et bien dangereux, de faire une mascarade sur la religion dans l’armée catholique. Qui aurait pu l’inventer ? MM. d’Elbée, Cathelineau avaient trop de religion ; Stofflet, trop peu d’autorité ; M. de la Rochejaquelein, trop de jeunesse ;