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moment où le général Quétineau lui présentait les clefs de la ville et les drapeaux ; rien ne fut pillé dans Thouars, quoiqu’on pût dire qu’il fut pris d’assaut. Les paysans coururent aux églises prier Dieu, sonner les cloches, et s’amusèrent, suivant leur usage, à brûler les arbres de la liberté, les papiers du district et de la municipalité ; ils ne prirent dans la ville que les armes et autres effets de guerre. C’est ainsi que ces pauvres Vendéens, qu’on appelait Brigands, se conduisaient dans toutes les villes dont ils s’emparaient ; je ne le répéterai plus, parce que c’était de même partout. L’amour de la vérité me force cependant d’ajouter que, lors du commencement de la révolte et de la première prise de Machecoul, on y commit plusieurs actes de barbarie ; c’est l’armée de Charette qui les fit, et je ne sais s’il y était alors ; en tout cas, c’est la seule et unique fois qu’on eut quelque reproche à faire aux Vendéens dans une des armées.

Ce combat fit la réputation de M. de Lescure, tous en parlaient avec admiration ; les paysans qui en revenaient et que je rencontrai à la Boulaye, où pas un ne me connaissait, me vantaient leur nouveau général, et m’assuraient que sûrement il était vrai que le bon Dieu écartait de lui les balles, parce que c’était un saint ; sans cela il aurait été tué, tant il s’était exposé. Cette opinion s’accrédita parmi ces bonnes gens ; ils croyaient qu’en se mettant derrière lui, rien ne pouvait les atteindre et qu’il était invulnérable ; les officiers comme les soldats lui obéissaient à l’envi. Il m’a dit les raisons qui l’avaient poussé à s’exposer si singulièrement ; depuis il l’a fait encore autant, mais par réflexion, pour entraîner ses soldats, n’étant jamais plus de sang-froid que dans les plus grands périls. Il me dit donc que : 1° la joie de se trouver à la première bataille lui avait fait perdre la tête et

    chevalier de la Légion d’honneur, et mourut à Sunay, commune de Châtillon-sur-Thouet, le 29 mars 1847.

    Son frère aîné, Joseph, né le 2 janvier 1763, montra la plus grande valeur, reçut sept balles dans divers engagements, et mourut à Courlay, canton de Cerizay, le 6 janvier 1832.