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et les autres, se seraient soumis à lui ; au lieu de cela, il remercia beaucoup M. d’Elbée, en lui disant qu’il ne désirait rien du Roi que l’honneur de le servir, et c’était vrai.

[En général, tels étaient les sentiments de presque tous les officiers de la Vendée ; on ne les entendait jamais parler de récompenses qu’ils espéraient du Roi, et, se sacrifiant pour lui, ils regardaient que c’était tout simplement leur devoir, et qu’ils n’y avaient nul mérite. M. d’Elbée lui-même, comme on voit, croyait qu’il serait avantageux à mon père de connaître un écuyer du prince de Condé, et je pense que bien peu, à la place de mon père, eussent laisser ignorer ce qu’ils étaient.]

M. de Bonchamps, qui se trouvait dans ce moment à Bressuire avec son armée, était un homme de trente-deux ans ; il avait fait la guerre dans les Indes sous M. de Suffren. Tout le monde lui accordait infiniment de talent et de bravoure ; il n’y avait qu’une voix sur son compte. Il était malheureux, car il ne pouvait aller au feu sans recevoir quelque blessure, et souvent par là son armée était privée d’un excellent général. Toute la grande armée l’aimait, et il était regardé comme le plus habile des chefs ; il n’avait nulle ambition et était aussi généreux que brave.

M. de Dommaigné[1] commandait la cavalerie ; c’était un très brave homme.

M. de Marigny fut mis à la tête de l’artillerie ; j’ai déjà peint son caractère ; il connaissait parfaitement tout ce qui regardait cette partie du militaire et aurait été excellent dans l’arme, ayant autant de talent que de courage, si son excessive vivacité ne lui eût pas fait souvent tourner la tête par trop d’ardeur ; aussi a-t-il presque autant fait perdre que gagner de batailles. Du reste, il savait très bien son état, s’étant particulièrement attaché

  1. Jean-Baptiste-Louis-Étienne de Dommaigné, comte de Brûlon, baptisé le 11 novembre 1749 à Saint-Augustin d’Angers, fils de J. B. L. de Dommaigné, seigneur de la Gaionnière et de la Roche-Hue en Anjou. Il avait été garde du corps en 1768 et gendarme de la garde en 1773.