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Merlin voit devant lui sa dame de beauté,
Et, sur un lit de pourpre, indolemment respire
L’ineffable senteur de la rose d’été.

Au seuil de cet Éden toute misère expire.
Une brise odorante y souffle mollement ;
C’est le pays du Rêve et l’amoureux empire.

Le rossignol s’éveille et chante son tourment.
Des couples d’autrefois il célèbre la gloire ;
Il dit le mal divin qu’on éprouve en aimant.

Une eau fraîche murmure en des vasques d’ivoire.
Mille fleurs, dans l’azur, aiment à s’y baigner.
Mille oiselets à l’aile rose y viennent boire.

Viviane les flatte et se plait à régner
Sur sa cour qui volette avec effronterie,
Quand la reine aux yeux bleus commence à se peigner.

Comme une aube d’avril elle est toute fleurie.
Sur ses robes couleur du soleil du matin
Brillent tous les joyaux du pays de féerie.

Mais ses lèvres encore ont la fraîcheur du thym ;
Son visage a gardé sa grâce naturelle,
On ne sait quoi de tendre et de presque enfantin.