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Comment, mourir ! non, reprenons courage.
Un teinct plus vif remonte en mon visage ;
Ma force esteinte est preste à s’animer,
Et tout mon sang vient à se r allumer.
Amour m’esmeut, je ne suis plus si blesme:
Philis m ayma que j’estois tout de mesme ;
Car je sçay bien qu’encore elle verroit
En mes regards des traicts qu’elle aimeroit.
Que si l’excez de ma douleur fatale
Rend quelquefois ce corps hideux et pasle,
Cela, Phillis, devroit plus animer
Ce beau désir qui te pousse à m’aymer.
Mon mal me rend ainsi désagréable ;
Pour trop aymer, je deviens moins aymable.
Ton œil me rend ou plus laid, ou plus beau,
Comme il m’approche ou tire du tombeau.


ELEGIE.


Enfin guery d’une amitié funeste,
A mon esprit désormais il ne reste
Qu’un sentiment de juste desplaisir
D’avoir languy d’un si mauvais désir ;
Bien mal-heureux d’avoir dans la pensée
Le souvenir de ma fureur passée,
Qui fut honteuse, et dont je me repens.
D’oresnavant plus sage, à mes despens,
Que si jamais mon jugement s’oublie
Jusqu’à rentrer en semblable folie,
Dieux qui vengez les crimes des humains,
Punissez-moy si vous avez des mains ;
Si vous avez pouvoir sur la tempeste,