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Tous les peuples chrétiens l’avaient fait leur arbitre,

Jamais autre que lui ne posséda ce titre ;

Sa vertu lui gagna tous ces noms glorieux,

Que notre fantaisie accorde aux demi-dieux.

Les plus grands rois trouvaient du mérite à lui plaire :

Tout aimait sa faveur, tout craignait sa colère.

Ainsi que ce Soleil, penchant vers le tombeau,

Jetait sur l’univers l’œil plus grand et plus beau,

Sa valeur, trop longtemps honteusement oisive,

Méditait d’arracher son myrte et son olive.

Le bruit de ses desseins par l’Europe volait,

Chacun de ses projets différemment parlait,

Tous les rois ses voisins pendaient sur la balance,

Egalement douteux où fondrait sa vaillance.

Son courage riait de voir que la terreur

Se mêlait parmi tous dans leur confuse erreur.

Son bien s’allait borner de la terre et de l’onde.

Et, sans vous, c’eût été le plus grand roi du monde.

Que sans vous son trépas eût causé de malheurs !

Qu’il nous eût fait verser et de sang et de pleurs !

Mais, grâce au Roi des cieux, tout prévoyant et sage,

Dont vous êtes ici la plus parfaite image,

Nous sommes consolés, et le même cercueil

Qui enferma ses os, renferma son deuil.

Les arts et les plaisirs, les autels et les armes,

Ont presque du regret d’avoir jeté des larmes.

Quel de tous les plus grands et des plus braves rois,

Assure mieux que vous l’autorité des lois ?

Votre empire nous sait si doucement contraindre,

Que les plus libertins ont plaisir à vous craindre ;

L’âme la plus sauvage a pour vous de l’amour ;

Quel si grand roi n’est point jaloux de votre Cour ?

Et les dieux, contemplant votre adorable vie,

Si vous n’étiez leur fils, vous porteraient envie.

Le Soleil est ravi quand son œil vous reluit,