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^^ 190. De même que les anciens Italiotes, les anciens Germains possé- daient déjà de nombreuses formules homophoniques, où figurait le plus souvent l'allitéiation, mais aussi la consonance, l'assonance ou la rime. Ils en employaient à coup sûr avant de se séparer en plusieurs peuples : nous en retrouvons dans la prose des anciens dialectes germaniques, qui leur sont communes à tous ; nous en retrouverions davantage encore si nos textes, en dehors du vieux norrois, n'étaient pas si peu nombreux et si spéciaux (i). Il en est ainsi de la locution que les Allemands ont con- servéejusqu'à nos jours, avec allitération et consonance, sous la forme Feind Jind Freiind (v. Sanders, /. c, i; loô), ou plutôt encore Freund u/id Feind :

Moyen haut-allemand : der vrûnti minnin und der vïanti (^Su/unia theo- logiac, MSD, xxxiv, 16, 5).

Frison: thâ fiunde alsa friunde (Moritz llevne, Forniae alliterantes ex nntiquis leij;ibus lingua frisica conscriplis, Halle, 186/1, 6, 10).

Vieil anglais : frëond and fêond (J. Earle, riro oft/ie Sa.von Clironicles. Oxford, iSGT), p. 207, année 1129).

Vieux norrois : sem fr;cndr en eigi sem fjândr (6V77j;ws — recueil de lois — Copenhague, 1829, II, p. 170).

Cette dernière phrase prouve bien l'antiquité de la formule : c'est le seul cas dans lequel frïi'ndr ait conservé le sens primitif (« amis ») ; par- tout ailleurs il signifie « parents » (2).

§ 19^. On a relevé dans la prose anglo-saxonne de nombreux exemples de rime, complète ou incomplète, qui présentent presque toujours une (orme rvthmée et même métrique (3). Il v en a toute une série à la fin d'un « charme pour la perte du bétail ». J'en cite seulement quelques-uns :

ne plot ne plôh, ne turf ne toft... ne fersc ne mersc... ne sandes ne strandes ('j).

Ce charme reproduit là tout simplement une formule juridique qui nous a aussi été conservée (5). Il n'en a modifié que la dernière locution : nelondes ne st rondes. Celle-ci, sous la forme he stronde ond be londe, se rencontre plusieurs fois dans le Codex dljdomallcus Aevi Saxonici (IV, p. 192, 207, 209, 212, 2i3, 210, 227, 229). On trouve encore dans les lois : healdan ond wealdan (Schmid, /. c, p. 2^18), tô slitan odâe to lntan{ib., p.8'1), etc., etc.

(1) En vieil allomand, nous n'avons guère (juc des traductions d'ouvrages religieux. Les textes frisons sont récents et rares.

(2) Cp. anglais yniir friends t^ ynur relaliva. Freund a aussi le sens de (( parent » en bas-alle- mand, en liessois, en franconien et en bavarois (v. kluge, Et. Worlcrb., à ce mot).

(3) Par forme métrique j'entends la forme d'un vers ou d'un hémisticbe. — .M. Ileusler ftï a aussi relevé chez les anciens Scandinaves, en particulier dans les formules juridirpics (v. Vcbcr Germ. Versbau, p. Ha et suiv.). Pour le germanique occidental, v. O. llotlmann, Rrimfnrmeln ini Weslfjermanisrlicn, Darmstadt, i885. .T'emprunte la plupart de mes exemples à Kluge, Paiil- Braune's Bcitràfje, l\, ^22 et suiv. Je les ai vérifiés et j'ai pu corriger une ou deux petites inexac- titudes.

(A) 0. Cockayne, Lceclulomx, III, Londres, iHGO, p.2H6 et suiv. — Plôb « ploughland )>, mersc « marsh ».

(5) R. Schmid, Gesclzc der Angelsacfiseii, t. I, 2"= éd., i858, p. :io8. — Cp. p. iiji, note l\.