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Dans la deuxiî'me strophe d'une hymne très ancienne et composée en partie par Coelius Sedulius (v® siècle), il n'y a de rime qu'aux vers pairs :

Beatus auctor saeculi Seruile corpus induit, \t carne carnem liberans Ne perderet quos condidit (i).

Dans les deux premiers exemples, la strophe se compose de deux octonaires à rime léonine ; dans le dernier, de deux octonaires à rime finale (2). On trouve déjà chez Plante des formes analogues(3). Mais ce qui abonde chez lui, c'est la rime batelée (v. !:; 187). Elle reparait dans les septénaires du moven âge:

Nunc comprimas bas lacrinias et luctum qui te urget.

HiLARius (disciple d'Abélard) (4).

Il n'y a pas de doute que l'emploi fréquent et régulier de la rime léonine dans l'hexamètre n'ait été suggéré à la même époque par la pré- sence accidentelle de l'homoeoteleuton chez les poètes classiques (5) :

Vitae praesentis si compare gaudia uentis, Cum neutrum duret. nemo reprehendere curet.

Hagen, Carmiiui mcdii acui, p. i6'i (G).

i^ iSg. Après la Cantilene de sainte Eulalie, le premier poème français que nous possédions se divise en strophes de quatre octosyllabes mascu- lins à rimes suivies (7) : aaaa , aahb (v. ^ 188). C'est un poème reli- gieux, la Passion du Christ, qui se chantait évidemment sur l'air des hymnes latines et qui leur a emprunté leur mètre, v compris la rime. Celle-ci coïncide avec le deuxième accent fixe, qui devait bientôt devenir le plus fort — le seul, dans l'octosvllabe — et elle servait j)ar là même à

(i) Prcmii-rc strojjlio : cardino — linillcni — priiicipcni — >iirgiiic (rimes embrassi'es). Troisième strophe: iiiscera — gratia — baitilat — iiouerat (rimes suivies). V^ersification fjiian- litalivc et accentuoUe.

(2) Les deux membres de l'octonaire sont réunis par le sens.

(3) Merc. 8A8 : stultitiam : pertinaciam (rime léonine), Cure. 3i3-4 : absorbeam : gaudeam (rime finale).

(/i) llilarius a composé des drames en latin. Il connaissait sans doute les vers de Plaute à rime batelée et il a pu les imiter directement. Mais cette rime se trouve également dans la poésie française, de langue d'oc et de langue d'oïl. Y a-t-ellc été introduite par les clercs ou est elle d'origine populaire ?

(5) Bède (d'après Kawczynski, Origine et Histoire des rythmes, p. 43): Ilomoeotcleulon, id est similis terminatio, dicitur quoticns média et postrema uersus, siuc scntentiae simili syllaba finitinlur. .. Hac figura et poctae et oratores saepe utuntur, poetae hoc modo : Pcruia diuisi patucrunt caernla ponti.

(6) V. Havel, Métrique, p. Oi. — La forme de la rime, dans ces hexamètres, montre qu'on les lisait d'après l'accent.

(-) Dans ce paragraplie, pour ne pas entraîner de complications, je dis rime au lii'U d'asso- nance. Il faut reniarfjuer f[ue dans la prononciation populaire du bas-latin la rime écrite se trans- formait souvent en assonance.