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1^4 ESTHÉTIQUE DU lUTIIME

forme inculte, comme aux jeux de mots de Plante : elle ne pouvait laisser d'avoir pour eux quelque chose de vulgaire ; ils ne pouvaient manquer de la bannir au fur et à mesure qu'ils imitaient avec plus d'exactitude leurs modèles grecs (i).

§ i88. Il est probable, au contraire, que le peuple la conserva, surtout la rime, qui convenait mieux à la langue latine après la disparition de l'ac- cent initial. Il n'avait aucune raison pour l'abandonner. 11 était encouragé à la garder par l'exemple de Plaute, à qui il avait sans doute emprunté, plus qu'à nul autre, ses deux mètres favoris, le septénaire et l'octonaire. Il fut inême porté à s'en servir de plus en plus au fur et à mesure que l'accent, en remplaçant le ton, lui permettait de la faire mieux ressortir. C'est ainsi, on peut le croire, que l'usage de la rime se développa dans la poésie latine populaire. Elle y existait certainement au iv* siècle. Les poètes chrétiens la lui empruntèrent en même temps que le mètre de leurs hymnes accentuelles. Nous l'avons trouvée dans \e psaume de saint Augus- tin (v. § iSy). Il avait pu en observer l'effet dans ces hymnes, entendues à l'église de Milan, dont la musique lui « avait fait sentir la vérité ))(2). C'est saint Ambroise (333-397) l*^^ introduisit dans cette église le chant des hymnes. Il en composa lui-même un certain nombre. En voici quelques vers :

Sic quinque millibus uiris Dum quinque panes dluidis, Edentium sub dentibus In ore crescebat cibus (3).

Hymne V.

Somno refectis artibus Spreto cubili surgimus ; Nobis, pater, canentibus Adesse te deposcimus.

Te lingua primum concinat. Te mentis ardor ambiat; Vt actuum sequentium Tu, sancte, sis exordium (4).

Hymne IX.

(i) L'allitération ne disparaît pourtant pas tout à fait II y en a des exemples chez Virgile : Aut componerc opes norant aut parcere parto (Enéide, VIII, 3 17). Dans ce vers, elle porte uni- quement sur des fortes. Quant à la rime, il semble difficile de la regarder comme accidentelle quand elle figure dans six vers de suite, sous forme léonine, chez Properce, III, Sa, 85.

(2) V. Combarieu, Les rapports de la musique et de la poésie, Paris, 189^, p. 17. M. Comba- rieu vise évidemment ce passage des Confessions (L. IX, c. vi) : Quantum fleui in hymnis et canticis tuis, suaue sonantis Ecclcsiae tuae uocibus commotusacriter I Voccs illae influebant auri- bus mais, et eliquabatur ueritas in cor meum. Mais pourquoi écrit-il (c Mailand » ?

(3) L'authenticité de cette hymne est assurée par le témoignage de Cassiodore — l'authenti- cité ou tout au moins l'antiquité. La versification en est à la fois quantitative et accentuelle.

(4) L'authenticité de cette hymne est affirmée par Ilincmar, évêquc de Rheims. L'autorité est sans doute insuffisante ; mais elle prouve au moins l'antiquité de ce morceau rimé. — La versi- fication est à la fois quantitative et accentuelle.