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ORIGINE ET EVOI.LTION DES METRES POÉTIQUES I 79

exactement le rythme de son modèle. Mais pour l'immense majorité des lecteurs, l'imitation ne se distingue pas de la précédente (5"), telle au moins que nous la trouvons dans les hexamètres de Kingsley ; tout au plus le vers semble-t-il mieux glisser, les syllabes s'adaptant naturellement par leur quantité à des durées d'un rapport simple et précis. Même quand on a l'oreille habituée aux mètres antiques, il faut une attention avertie et soute- nue pour remarquer ici le rythme quantitatif. Ce fait suflit à prouver que si le rapport de durée entre syllabes, c'est-à-dire le caractère binaire ou ternaire du rythme, joue un rôle important dans l'efTet musical du vers anglais, on ne saurait y voir le principe de la versification anglaise ni s'en servir pour classer d'une manière générale les pieds ou les mètres. On peut l'étudier dans des cas isolés, au même titre que l'accentuation relative des fortes et des faibles, mais non l'ériger en base du rythme anglais. Cette base, c'est uniquement l'isochronisme des pieds, qui ne se distinguent essentiellement que par le nombre des syllabes. Si nous prenons accent dans le sens de temps marqué, nous devons reconnaître que les métriciens des trois derniers siècles n'avaient pas tort, au fond, de faire reposer la versification anglaise sur l'accent et le nombre des syllabes. 11 est vrai qu'ils ne l'entendaient pas ainsi. Leurs théories sont si confuses que je ne puis même pas tenter d'en donner ici un aperçu : il faudrait y consacrer tout un livre (i). Ces théories ont nui à l'imitation des mètres antiques. Ceux-ci ne peuvent se reproduire en anglais que par une adaptation accen- tuelle, comme celle de Tennyson ou de Kingsley, en tenant compte ou non de la quantité.

D. — CONCLUSION

(vers anglais).

s; 171. La poésie anglaise tient de son origine une versification accen- tuelle. Elle y a adapté plus ou moins correctement les mètres étrangers qu'elle a empruntés à différentes reprises. De ceux-ci elle a souvent cher- ché à garder le syllabisme, ce qui a entraîné des variations rythmiques combinées (v. P'" Partie, § 822 suiv.) ; plus rarement et avec beaucoup moins de succès, elle a essayé d'en reproduire la quantité.

Le rvthme n'y est constitué que par la coïncidence de l'accent avec le temps marqué (2). Aussi les pieds n'y diffèrent-ils en principe que par le nombre des syllabes. C'est donc par là seulement qu'on peut les définir, ainsi que le rythme : il y en a de dissvllabiques, de trissyllabiques et de mixtes. Les variations rythmiques ne s'obtiennent non plus, à première vue du moins, que par l'augmentation ou la diminution du nombre de syl- labes. Mais il en est beaucoup d'autres : le degré d'accentuation des fortes varie à chaque instant, aussi bien que celui des faibles ; la durée des syl-

(1) V. ceux du M. Omond: Englisit Metrisls, Tiinbridgo Wells, igoS, et 1907. On consultera aussi avec fruit English Verse, de M. R.-M. Alden, New- York, igoS.

(2) Avec les lirnilalions indiquées au § ifil\.