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ORIGOE ET ÉVOLUTION DES MÈTRES POÉTIQUES I ^5

(le mètres à nombre fixe de syllabes et à coupe réf^ulière. Mais ils ne pou- vaient ressembler à des vers allemands que si par hasard les accents prin- cipaux y coïncidaient régulièrement avec l'ancien temps marqué. Joh. Clajus et surtout Opitz semblent l'avoir au moins entrevu (i). Quoi qu'il en soit, leur opinion se confondit bientôt avec celle de Schottelius : on crut que, pour reproduire en allemand les mètres antiques, il fallait rem- placer les longues par des syllabes accentuées et les brèves par des inaccentuées. C'était confondre la quantité et l'accentuation, la durée et l'intensité (2). En appliquant aveuglément cette théorie on pouvait donner à un prétendu hexamètre l'allure d'un vers ïambique ; en effet, on ne se préoccupait point du temps marqué, qui seul indique à quel mètre appar- tient une suite de spondées. Il y avait encore d'autres inconvénients dans les mètres où la forte n'est pas nécessairement une longue. Heureusement, l'instinct des bons poètes les a guides dans l'application.

(^) Imitation allemande de la strophe saphique :

Stets am Stoff klebt unsere Seele, Ilandlung Ist der Welt allmïichtiger Puis, und deshalb Flotet oftmals tauberem Ohr der hohe Lyrische Dichter.

Platen, Oden, XXX.

Dans la prononciation de la prose et des vers latins, les Italiens mar- quent les syllabes toniques d'un accent d'intensité, et dans les vers ils ne tiennent aucun compte du temps marqué. Aussi ont-ils de bonne heure imité le rythme que cette accentuation donne aux vers latins.

(f) Imitation italienne de la strophe saphique :

Odio rusî.ta poesia : concède Comoda al volgo i flosei (ianchi e senza Palpiti sotto i consueti amplessi Stendesi e dorme.

Carducci, Odi Barbare, Preludio.

On a plus ou moins essayé ces trois imitations en France, en Allemagne, en Angleterre, en Italie, en Espagne et dans les pavs Scandinaves. Je

(i) Joli. Clajus, Grammatica Germanicac linguae (1578). — Opitz, Buch von der deulschen Poelerei (162/4), ch. vu.

(2) Cette confusion provient de la tendance que nous avons 1° h prolonger les sons forts, 2° à croire les sons forts plus longs qu'ils ne sont. Elle n'a pas disparu: on l:i trouve encore dans les livres de Sanders (p. ex. Abriss der d. Sllbenrnessun(j it. Vcrskunst, 2*' éd., Berlin, 1891). Elle est renversée dans la notation des musicographes allemands, qui se servent des signes _ et ■j pour représenter la force et la faiblesse des sons (v. Ilcinze, Grammaire musicale, Paris, 1880, p. 7 et suiv.).