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Il6 ESTHÉTIQUE DU RÏTHAIE

ment d'un temps marque — au commencement, au milieu ou à la fin — ren- forcement correspondant à l'importance de la section. Quand il est final ou même initial, il constitue une pause intensive ou accentuelle(i). La pause temporelle et surtout la pause mélodique jouent un rôle au moins aussi considérable. La section rythmique peut être suivie d'un silence, mais ce n'est pas nécessaire (2). Comme elle forme une unité d'une tout autre es- pèce que les unités rythmiques, elle n'est aucunement forcée de coïncider avec celles-ci : elle peut commencer et finir n'importe où, au beau milieu d'une mesure ou d'un pied, par exemple, tout aussi bien qu'au commence- ment ou à la fin. Quand on la définit par le nombre des mesures ou des pieds qu'elle contient, on entend presque toujours simplement le nombre des temps marqués (principaux). Toute section rythmique complète et bien dé- limitée constitue un mètre (?>).

Il est absolument indispensable que la fin d'un morceau soit indiquée avec une netteté parfaite, unmistakeahle . Autrement, nous continuons à attendre le retour du temps marqué, et comme il ne revient plus, nous avons la sensation de quelque chose d'inachevé, d'incomplet. Cette sensa- tion, en dehors même de toute considération purement esthétique, est vrai- ment pénible. Quand on ne nous prévient pas, la nuit, que nous sommes arrivés au bout de l'escalier, notre pied continue à s'élever et à s'abaisser suivant le rythme adopté, et je ne sais lequel est le plus désagréable de ce faux mouvement en lui-même ou de la surprise qui nous saisit et nous déso- riente un instant.

Dans une suite de sections rythmiques, il suffit d'indiquer ou le com- mencement ou la fin de chacune.

Renfo rcem en ts m étriq u es .

§ 128. Ainsi, comme le rythme du chant repose sur le temps marqué, nous renforçons le premier de chaque section ou le dernier. C'est là ce qu'on peut appeler un renforcement métrique, puisqu'il sert à déterminer le mètre. Suivant qu'il est initial ou final, la marche de l'ensemble est dé- croissante ou croissante. Ace point de vue, chaque peuple se conforme d'or- dinaire à l'accentuation de sa langue. Aussi les auteurs allemands ne par- lent-ils guère que de séries décroissantes. Dans nos chansons populaires, c'est plutôt le dernier temps marqué, celui de la rime, que nous tendons à faire surtout ressortir (/i). En réalité, il y a toujours en principe un renfor-

(i) J'appelle pause tout phénomène phonétique qui sert à indiquer la Un d'une division lin- guistique, métriqtie ou musicale (v. \^^ Partie, § i45 et 8i, m, 128).

(2) Le silence, à lui seul, ne constitue pas une pause (v. ih., § liJS).

(3) Les anciens distinguaient entre le mètre et le rylhmc, c'est-à-dire entre la section ryth- mique et la suite indéfinie des unités rythmiques. V. Aristote, Poétique, c. /J ; Aristide Quint., éd. Meibom, p. /I9 ; Quintilien, Institut., IX, c. 4; Gharisius, Grairim. lat. (Knil), I, p. 289; Saint-Augustin, De Musica, c. 'à; Diomède, Gramm. lat.. I, p. A74 ; Fracjmenta Parisiana, Gramm. lat., Vl, p. 63 1.

(4) Il en est de même dans notre diction poétique : le renforcement si marqué de la fin du vers, de la rime, frappe et choque les Allemands, les Anglais et les Scandinaves.