Page:Verne - Nord contre sud, Hetzel, 1887.djvu/181

Cette page a été validée par deux contributeurs.
175
pendant quelques heures.

— Les canonnières arrêtées… dit James Burbank, arrêtées par un obstacle infranchissable ?…

— Oui, mon père, répondit Gilbert, arrêtées par le manque d’eau. Il faut que la marée soit assez forte pour permettre de passer cette barre, et encore sera-ce assez difficile. Mars connaît parfaitement le chenal, et c’est lui qui doit nous piloter.

— Attendre !… Toujours attendre ! s’écria James Burbank. Et combien de jours ?

— Trois jours au plus, et vingt-quatre heures seulement, si le vent du large pousse le flot dans l’estuaire. »

Trois jours ou vingt-quatre heures, que ce temps serait long pour les hôtes de Castle-House ! Et, d’ici-là, si les confédérés comprenaient qu’ils ne pourraient défendre la ville, s’ils l’abandonnaient comme ils avaient abandonné Fernandina, le fort Clinch, les autres points de la Géorgie et de la Floride septentrionale, Texar ne s’enfuirait-il pas avec eux ? Alors, en quel endroit irait-on le chercher ?

Cependant, s’attaquer à lui, en ce moment où il faisait la loi à Jacksonville, où la populace le soutenait dans ses violences, c’était impossible. Il n’y avait pas à revenir là-dessus.

M. Stannard demanda alors à Gilbert s’il était vrai que les fédéraux eussent éprouvé quelque insuccès dans le Nord, et ce qu’on devait penser de la défaite de Bentonville.

« La victoire de Pea-Ridge, répondit le jeune lieutenant, a permis aux troupes de Curtis de reprendre le terrain qu’elles avaient un instant perdu. La situation des nordistes est excellente, leur succès assuré dans un délai qu’il est difficile de prévoir. Quand ils auront occupé les points principaux de la Floride, ils empêcheront la contrebande de guerre qui se fait par les passes du littoral, et les munitions comme les armes ne tarderont pas à manquer aux confédérés. Donc, avant peu, ce territoire aura retrouvé le calme et la sécurité sous la protection de notre escadre !… Oui… dans quelques jours !… Mais, d’ici-là… »

L’idée de sa sœur, exposée à tant de périls, lui revint avec une telle