Page:Verne - Mathias Sandorf, Hetzel, 1885, tome 2.djvu/56

Cette page a été validée par deux contributeurs.

50
mathias sandorf.

en parlions maintenant, et surtout de l’avenir que j’entrevois pour vous ?

— Je vous écoute, monsieur, répondit Pierre. Dans votre lettre vous m’avez fait comprendre qu’il s’agissait de mes intérêts, peut-être…

— En effet, monsieur Bathory, et si je n’ignore pas quel a été le dévouement de votre mère pendant la jeunesse de son fils, je sais aussi que vous avez été digne d’elle, et qu’après de si rudes épreuves, vous êtes devenu un homme…

— Un homme ! répondit Pierre Bathory, non sans amertume. Un homme qui n’a pas encore pu se suffire à lui-même, ni rendre à sa mère ce qu’elle a fait pour lui !

— Sans doute, répondit le docteur, mais la faute n’en est point à vous. Combien il est difficile de se faire une situation au milieu de cette concurrence qui met tant de rivaux à se disputer si peu de places, je ne puis l’ignorer. Vous êtes ingénieur ?

— Oui, monsieur ! Je suis sorti des Écoles avec ce titre, mais ingénieur libre, n’ayant aucune attache avec l’État. J’ai donc dû chercher à me placer dans quelque société industrielle, et, jusqu’ici, je n’ai rien trouvé qui pût me convenir — du moins à Raguse.