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mathias sandorf.

— Monsieur, répondit Mme Bathory, c’est hier seulement que j’ai appris votre arrivée à Gravosa, et j’ai aussitôt envoyé Borik pour vous demander un entretien.

— Madame, je suis prêt à vous entendre.

— Je me retire, dit le vieillard.

— Non, restez, Borik ! répondit Mme Bathory. Seul ami de notre famille, vous n’ignorez rien de ce que j’ai à dire au docteur Antékirtt ! »

Mme Bathory s’assit, et le docteur prit place devant elle, tandis que le vieillard restait debout près de la fenêtre.

La veuve du professeur Étienne Bathory avait alors soixante ans. Si sa taille était droite encore, malgré la pesanteur de l’âge, sa tête toute blanche, sa figure sillonnée de rides, indiquaient combien elle avait eu à lutter contre le chagrin et la misère. Mais on la sentait énergique encore, comme elle l’avait été dans le passé. En elle se retrouvait la vaillante compagne, la confidente intime de l’homme qui avait sacrifié sa position à ce qu’il avait cru être son devoir, sa complice enfin, lorsqu’il s’était jeté dans la conspiration avec Mathias Sandorf et Ladislas Zathmar.

« Monsieur, dit-elle d’une voix dont elle eut vainement essayé de dissimuler l’émotion, puisque