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great-eyry

Il va sans dire que les environs étaient déserts, j’entends par là que nulle créature vivante ne se montrait, à l’exception de deux ou trois couples de grands oiseaux de proie qui planaient au-dessus de l’aire.

Nos montres marquaient trois heures alors, et M. Smith de dire d’un ton vexé :

« Quand nous resterions ici jusqu’au soir, nous n’en apprendrions pas davantage !… Il faut partir, monsieur Strock, si nous voulons être de retour à Pleasant-Garden avant la nuit. »

Et, comme je le laissais sans réponse, et ne quittais pas la place où j’étais assis, il ajouta, en venant près de moi :

« Eh bien, monsieur Strock, vous ne dites rien !… Est-ce que vous ne m’avez pas entendu ?… »

Au vrai, cela me coûtait d’abandonner la partie, de redescendre sans avoir accompli ma mission !… Et je sentais, avec l’impérieux besoin de persister, redoubler ma curiosité déçue.

Mais que faire ?… Était-il en mon pouvoir d’éventrer cette épaisse enceinte, d’escalader ces hautes roches ?…

Il fallut se résigner, et, après avoir jeté un dernier regard vers le Great-Eyry, je suivis mes compagnons, qui commençaient à dévaler les pentes du blad.

Le retour s’effectua sans grandes difficultés comme sans grandes fatigues. Avant cinq heures, nous dépassions les dernières rampes de la montagne, et le fermier de Wildon nous recevait dans la salle où attendaient rafraîchissements et aliments substantiels.

« Ainsi, vous n’avez pas pu pénétrer à l’intérieur ?… nous demanda-t-il.

— Non, répondit M. Smith, et je finirai par croire que le Great-Eyry n’existe que dans l’imagination de nos braves campagnards ! »

À huit heures et demie du soir, notre voiture s’arrêtait devant