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SECOND VOYAGE DU CAPITAINE COOK.

« Un premier phénomène avait déjà frappé son esprit sous la zone torride, dit la relation. Tant que les vaisseaux étaient restés dans ces parages, nous n’avions eu presque point de nuit et nous avions pu écrire à minuit à la lueur du soleil. Œdidi pouvait à peine en croire ses yeux, et il nous assura que ses compatriotes le traiteraient de menteur, quand il leur parlerait de la pluie pétrifiée et du jour perpétuel. »

Le jeune Taïtien eut d’ailleurs le temps de s’habituer à ce phénomène, car le navire s’avança jusqu’au 76e degré de latitude sud, au travers des glaces flottantes. Alors, convaincu que, s’il existait un continent, les glaces en rendaient l’accès presque impossible, Cook se détermina à porter au nord.

La satisfaction fut générale. Il n’était personne à bord qui ne souffrît de rhumes tenaces et violents, ou qui ne fût attaqué du scorbut. Le capitaine était lui-même très sérieusement atteint d’une maladie bilieuse, qui le força de se mettre au lit. Pendant huit jours, il fut en danger de mort, et sa convalescence devait être aussi longue que pénible. La même route fut suivie jusqu’au 11 mars. Quelle joie, lorsque, au soleil levant, la vigie cria : Terre ! Terre !

C’était l’île de Pâques de Roggewein, la terre de Davis. En approchant du rivage, la première chose qui frappa les regards des navigateurs, ce furent ces gigantesques statues dressées sur la plage, qui avaient autrefois excité l’étonnement des Hollandais.

« La latitude de l’île de Pâques, dit Cook, correspond, à une minute ou deux près, avec celle qui est marquée dans le journal manuscrit de Roggewein, et sa longitude n’est fautive que d’un degré. »

Ce rivage, composé de roches brisées à l’aspect noir et ferrugineux, annonçait les traces d’une violente éruption souterraine. Au milieu de cette île, stérile, et déserte, on apercevait quelques plantations éparses.

Singularité merveilleuse ! Le premier mot que prononcèrent les insulaires, en s’approchant du vaisseau pour demander une corde, fut un terme taïtien. Tout, d’ailleurs, annonçait que les habitants avaient la même origine. Comme les Taïtiens, ils étaient tatoués et vêtus d’étoffes qui ressemblaient à celles des îles de la Société.

« L’action du soleil sur leur tête, dit la relation, les a contraints d’imaginer différents moyens de s’en garantir. La plupart des hommes portent un cercle d’environ deux pouces d’épaisseur tressé avec de l’herbe d’un bord à l’autre et couvert d’une grande quantité de ces longues plumes noires qui décorent le col des frégates. D’autres ont d’énormes chapeaux de plumes de goéland brun, presque aussi larges que les vastes perruques des jurisconsultes européens ;