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Du reste, Bill Stell n’était pas seul à faire ce profitable métier. D’autres que lui l’exerçaient, soit à cette station du lac Lindeman, soit à la station du lac Benett. On peut même dire que ces entrepreneurs d’origine canadienne ou américaine n’y suffisaient pas, puisque c’étaient par milliers que les émigrants affluaient à cette époque de l’année, ayant hâte d’être à Dawson-City au début de la période d’exploitation qui s’ouvre d’habitude dans les premières semaines du mois de mai.

Il est vrai, nombre de ces émigrants ne s’adressaient ni au Scout ni à ses collègues, et cela par raison d’économie. Mais alors ceux-là étaient forcés d’amener leur matériel depuis Skagway, de charger sur leurs traîneaux des bateaux démontables en bois, même en tôle, et l’on a vu ce qu’étaient les difficultés de traverser avec ces lourds impedimenta la chaîne du Chilkoot. Elles n’étaient pas moins grandes par la White Pass, et sur l’un comme par l’autre chemin, une bonne partie de ce matériel restait en détresse.

Il en est cependant qui, pour éviter soit l’embarras soit la dépense, recourent à un autre moyen. Au lieu d’amener leurs bateaux à la rive des lacs, ils peuvent avoir plus de profits à les faire construire sur place, ou à les construire eux-mêmes. En cette région boisée, les matériaux ne manquent point. Mais alors que de retards à craindre : il faut le temps d’abattre les arbres, de les débiter en membrures et en bordages, de les agencer de façon solide car ils seront exposés à de trop fréquents et trop rudes chocs, soit contre les glaçons, soit contre les roches. Il est vrai, déjà quelques chantiers sont formés autour de la station, des scieries fonctionnent et la construction tend à s’activer.

À l’arrivée de la caravane, Bill Stell fut reçu par son contremaître qui habitait la maisonnette avec quelques hommes, Canadiens comme lui. D’ordinaire, ils s’employaient comme pilotes pour conduire les bateaux de lac en lac jusqu’au cours du Yukon. On pouvait s’en fier à leur habileté ; ils connaissaient les nécessités de cette navigation, difficile même lorsque la débâcle s’est produite.

L’air étant très vif, Summy Skim, Ben Raddle, les religieuses furent très satisfaits de prendre logement dans la maison du Scout, dont les meilleures chambres étaient à leur disposition. Entre le dedans et le dehors, la différence de température était de plus de vingt degrés centigrades. Quant au séjour, il ne durerait que vingt-quatre heures. Les bateaux étaient prêts à recevoir les bagages, et quant aux provisions, ce serait à la station du lac Benett qu’elles se feraient dans des conditions plus favorables.

Tout d’abord sœur Marthe et sœur Madeleine se retirèrent dans leur petite chambre, chauffée par un poêle, et en les conduisant, Summy Skim les assura que pour ce voyage entre Skagway et Dawson-City, le plus fort était fait.

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