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LES YEUX BLEUS.

l’approche d’une importante cité. Les villas, tout d’abord, s’étaient succédé, de plus en plus rapprochées. Puis, des usines avaient souillé le ciel des fumées de leurs hautes cheminées. Bientôt Ilia Brusch et son compagnon aperçurent quelques fiacres mettant dans cette banlieue une note franchement urbaine.

Dès les premières heures de l’après-midi, la barge dépassa Nussdorf, point où s’arrêtent les bateaux à vapeur, en raison de leur tirant d’eau. La modeste embarcation du pêcheur avait à cet égard de moindres exigences. D’ailleurs, elle ne contenait pas, comme les dampsschiffs, des voyageurs, qui eussent exigé d’être transportés par le canal jusqu’au cœur même de la ville.

Libre de ses mouvements, Ilia Brusch suivit le grand bras du Danube. Avant quatre heures, il s’arrêtait près de la rive et frappait son amarre à l’un des arbres du Prater, promenade fameuse, qui est à Vienne ce que le Bois de Boulogne est à Paris.

« Qu’avez-vous donc aux yeux, monsieur Brusch ? demanda à ce moment Karl Dragoch qui, depuis l’incident des lunettes, n’avait prononcé que de rares paroles.

Ilia Brusch interrompit son travail et se tourna vers son passager.

— Aux yeux ? répéta-t-il d’un ton interrogatif.

— Oui, aux yeux, dit M. Jaeger. Ce n’est