Page:Verne - L’Invasion de la mer.djvu/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.
88
l’invasion de la mer

mer intérieure. En effet, à les en croire, par suite de l’humidité que provoquerait l’inondation des chotts, les dattes perdraient leurs excellentes qualités. C’est grâce à la sécheresse de l’air du Djerid qu’elles occupent le premier rang parmi ces fruits, dont les tribus font leur principale nourriture, et qui peuvent se conserver indéfiniment pour ainsi dire. Le climat changé, elles ne seraient pas plus estimées que celles qui se recueillent dans le voisinage du golfe de Gabès ou de la Méditerranée.

Ces appréhensions étaient-elles justifiées ? Les avis, on le sait, se partageaient à cet égard. Mais, le certain, c’est que les indigènes de la basse Algérie et de la basse Tunisie protestaient et s’indignaient contre l’exécution de la mer Saharienne, à la pensée des irréparables dommages que devait causer le projet Roudaire.

Aussi, dès cette époque et pour protéger la région contre l’envahissement progressif des sables, on avait organisé un embryon de service forestier qui s’était assez bien développé par la suite, comme le prouvaient des plantations multipliées de sapins et d’eucalyptus et des opérations de clayonnage, analogues à celles du département des Landes. Mais, si les moyens de s’opposer aux progrès de l’envahissement sont connus et mis en pratique, il est nécessaire que la lutte laborieuse soit ininterrompue, sans quoi les sables ne sont pas longs à franchir les obstacles et à reprendre leur œuvre de destruction et d’engloutissement.

Les voyageurs se trouvaient alors au cœur même du Djerid tunisien, dont les principales villes et bourgades sont Gafsa, Tameghza, Mèdas, Çhebika, Nefzaoua et Tozeur, — à laquelle il faut rattacher les grandes oasis de Nefta, d’Oudiane et de La Hammâ, et qui constituait comme un centre où l’expédition pouvait se rendre compte de l’état des travaux de la Compagnie Franco-étrangère, si brusquement interrompus par des difficultés financières bientôt infranchissables.

Tozeur compte environ dix mille habitants. Près de mille hectares de terre y sont mis en culture. L’industrie s’y borne à la