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mais notre wagon-projectile n’est pas l’arche de Noé. Il n’en a ni la capacité ni la destination. Ainsi restons dans les limites du possible. »

Enfin, après de longues discussions, il fut convenu que les voyageurs se contenteraient d’emmener une excellente chienne de chasse appartenant à Nicholl et un vigoureux terre-neuve d’une force prodigieuse. Plusieurs caisses des graines les plus utiles furent mises au nombre des objets indispensables. Si l’on eût laissé faire Michel Ardan, il aurait emporté aussi quelques sacs de terre pour les y semer. En tout cas, il prit une douzaine d’arbustes qui furent soigneusement enveloppés d’un étui de paille et placés dans un coin du projectile.

Restait alors l’importante question des vivres, car il fallait prévoir le cas où l’on accosterait une portion de la Lune absolument stérile. Barbicane fit si bien qu’il parvint à en prendre pour une année. Mais il faut ajouter, pour n’étonner personne, que ces vivres consistèrent en conserves de viandes et de légumes réduits à leur plus simple volume sous l’action de la presse hydraulique, et qu’ils renfermaient une grande quantité d’éléments nutritifs ; ils n’étaient pas très-variés, mais il ne fallait pas se montrer difficile dans une pareille expédition. Il y avait aussi une réserve d’eau-de-vie pouvant s’élever à cinquante gallons[1] et de l’eau pour deux mois seulement ; en effet, à la suite des dernières observations des astronomes, personne ne mettait en doute la présence d’une certaine quantité d’eau à la surface de la Lune. Quant aux vivres, il eût été insensé de croire que des habitants de la Terre ne trouveraient pas à se nourrir là-haut. Michel Ardan ne conservait aucun doute à cet égard. S’il en avait eu, il ne se serait pas décidé à partir.

« D’ailleurs, dit-il un jour à ses amis, nous ne serons pas complètement abandonnés de nos camarades de la Terre, et ils auront soin de ne pas nous oublier.

— Non, certes, répondit J.-T. Maston.

— Comment l’entendez-vous ? demanda Nicholl.

— Rien de plus simple, répondit Ardan. Est-ce que la Columbiad ne sera pas toujours là ? Eh bien ! toutes les fois que la Lune se présentera dans des conditions favorables de zénith, sinon de périgée, c’est-à-dire une fois par an à peu près, ne pourra-t-on pas nous envoyer des obus chargés de vivres, que nous attendrons à jour fixe ?

— Hurrah ! hurrah ! s’écria J.-T. Maston en homme qui avait son idée ; voilà qui est bien dit ! Certainement, mes braves amis, nous ne vous oublierons pas !

  1. Environ 200 litres.