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Et, de fait, le garçon travaillait en conscience à récupérer le plus possible des déboursés paternels.

Cependant, après la dernière réponse de Clovis Dardentor, la conversation fut aiguillée sur un autre embranchement. Ne pourrait-on trouver le défaut de la cuirasse chez ce bon vivant, bon buvant et bon mangeant ? Que sa constitution fût excellente, sa santé inaltérable, son organisme de premier choix, ce n’était pas discutable. Mais, quoi qu’il en eût dit, il finirait par quitter ce bas monde, comme les autres mortels, — disons presque tous, afin de ne décourager personne. Et, lorsque sonnerait cette heure fatale, à qui irait la grosse fortune ?… Qui prendrait possession des maisons, des valeurs mobilières de l’ancien tonnelier de Perpignan, la nature ne lui ayant donné d’héritier ni direct ni indirect, pas un seul collatéral au degré successible ?…

On lui en fit la remarque, et Marcel Lornans de dire :

« Pourquoi n’avoir point songé à vous créer des héritiers ?

— Et comment ?…

— Comme cela se fait, pardieu ! s’écria Jean Taconnat, en devenant le mari d’une femme, jeune, belle, bien portante, digne de vous…

— Moi… me marier ?…

— Sans doute !

— Voilà une idée qui ne m’est jamais venue !

— Elle aurait dû vous venir, monsieur Dardentor, déclara le capitaine Bugarach, et il est encore temps…

— Êtes-vous marié, mon cher capitaine ?…

— Non.

— Et vous, docteur ?…

— Point.

— Et vous, messieurs ?…

— Nullement, répondit Marcel Lornans, et, à notre âge, cela n’a rien de surprenant !

— Eh bien ! si vous n’êtes pas mariés, pourquoi voulez-vous que je le sois ?…